Rendant hommage au travail de deux scientifiques, « Aurès, 1935. Photographies de Thérèse Rivière et Germaine Tillion », présentée au Pavillon populaire, à Montpellier, jusqu’au 15 avril prochain est une exposition inédite révélant le regard sensible de deux femmes d’exception, missionnées en 1935 par la France pour étudier les Chaouia, tribu berbère d’Algérie et vivant dans le massif des Aurès, à la lisière du Sahara. 120 photographies rassemblées pour témoigner de ce qu’était une population, aujourd’hui disparue.
Véritable « témoignage de la pratique ethnographique des années 1930 », cette exposition, première d’une série qui sera consacrée aux rapports entre l’histoire et la photographie -thématique retenue en 2018 par Gilles Mora, directeur du Pavillon Populaire-, permet également au visiteur de mieux comprendre une population à l’économie agropastorale organisée autour de greniers collectifs, aujourd’hui disparue à cause de la politique de « regroupement » des populations villageoises mise en place par l’armée française entre 1935 et 1954.
Un travail longtemps oublié et aujourd’hui réhabilité grâce notamment aux 1 200 négatifs -photos- retrouvés chez Germaine Tillion par la biographe Nancy Wood en 2000.
Deux regards différents et complémentaires
Alors que l’une nous présente, à travers ses clichés, les activités matérielles et l’économie domestique, l’autre se concentre sur les relations de parenté et de pouvoir. Deux femmes aux regards complémentaires et aux destins tragiques (Germaine Tillion a été déportée de 1942 à 1945 et Thérèse Rivière a été un internée en hôpital psychiatrique de 1948 à 1970, date de sa mort) qui nous plongent dans un formidable travail de terrain au plus près de la population des Aurès.
« La sauvagerie, c’est en Europe que je l’ai apprise«
Missionnées pour une longue enquête (deux ans) par le musée d’ethnographie du Trocadéro -renommé en 1937 le musée de l’Homme-, ces deux femmes, malgré leurs différences culturelles, étaient ‘’totalement intégrées dans la société chaouia’’ comme l’explique Christian Phéline, le commissaire de l’exposition.
Un sentiment de sécurité à retrouver à la fin de l’exposition avec cette phrase : « J’étais dans les Aurès avec un sentiment de sécurité complète. La sauvagerie c’est en Europe que je l’ai apprise. A Ravensbrück, vraiment, nous avions à faire à des sauvages« .
2018 au Pavillon Populaire : 3 expositions pour témoigner de l’histoire
En 2018, Gilles Mora, Directeur du Pavillon Populaire à décidé de mettre en avant le rapport entre Histoire et photographie. Pour cela, la saison 2018 présentera des documents souvent inédits relevant, au fil des trois expositions qui seront présentées tout au long de l’année, de l’enquête ethnologique, de la photographie de propagande ou encore du photojournalisme militant. C’est donc à une réflexion politique en images, et par l’image, que vont inviter ces trois moments forts en relation avec le devoir de mémoire.
Véritables événements tant par leur absolue nouveauté que par l’intérêt historique ou esthétique qu’elles abordent, ces trois expositions vont permettre à un large public, grands et petits, à se familiariser avec une photographie exigeante.
>> Pratique : “Aurès 1935” Photographies de Thérèse Rivière et Germaine Tillion. Jusqu’au 15 avril. Pavillon populaire, Esplanade Charles de Gaulle à Montpellier. Du mardi au dimanche de 10h à 13h et de 14h à 18h